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La voie du milieu
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1 novembre 2011

Pourquoi je suis contre le rassemblement prévu à la Kasbah en faveur des acquis de la femme tunisienne

Demain doit avoir lieu un rassemblement à la Kasbah pour défendre les acquis de la femme tunisienne. Contrairement à l’avis dominant, je suis contre cette manifestation. Voila pourquoi.

La catégorie de la population qui va se mobiliser appartient principalement à la population aisée de la Tunisie. Or le résultat des dernières élections a montré que cette population n’intéresse pas le gros du peuple tunisien. Au contraire, c’est cette population que le peuple n’aime pas, qu’il associe en vrac au milieu des affaires, corrompus avec l’ancien régime, aux riches qui spolient les pauvres ou encore aux ennemis de l’islam et de l’identité arabo-musulmane. Bien des gens ont voté Ennahdha parce qu’ils font cette association.

Aller manifester comme cela a déjà été fait à la coupole, ou encore en faveur de la laïcité ou encore dernièrement en faveur de la liberté d’expression suite à l’affaire Nesma, ne peut que braquer encore un peu plus la population sur cette catégorie de gens et renforcer encore plus les rangs d’Ennahdha. Bien que le but soit noble, je suis convaincu que le Tunisien fera encore une fois l’amalgame entre toutes ces affaires et la manifestation programmée. Et s’il ne le fait pas, certains partis se feront un plaisir de l’aider à faire cette confusion.

Au lieu de cela, la société civile devrait se mobiliser et porter ses efforts sur les femmes et les jeunes filles des catégories défavorisées ou des régions intérieures, et qui, pour la plupart, ont un sort bien peu enviable.

Combien sont-elles à trimer tous les jours pour ramener un salaire de misère à la maison, que leur mari va dépenser au café, en cigarettes ou en boissons alcoolisées ?

 Combien sont-elles, qui, pour un oui ou pour un non sont battues mais ne peuvent, ou ne doivent surtout rien dire parce qu’une femme ne dénonce pas son mari ? combien sont-elles qui rêvent de divorcer mais qui n’osent le faire, qui ne trouvent ni compréhension, ni compassion, ni réconfort auprès de leur propre famille parce qu’une femme divorcée n’a plus d’honneur ?

Combien sont-elles, ces jeunes filles qu’on oblige à arrêter les études pour les enrôler comme bonne à tout faire dans les maison bourgeoise des grandes villes ? Quel avenir attend ces filles là ?

Combien sont-elles ces jeunes filles que l’on oblige à l’âge de 17 ou 18 ans à épouser un cousin qu’elles n’aiment pas et qui va lui faire paraitre la vie bien longue ?

Combien sont-elles à travailler dans des ateliers ou des usines, dans des conditions humiliantes, à devoir céder aux caprices de patrons peu scrupuleux ? Combien sont-elles à se voir licencier dès qu’elles se marient ou dès qu’elles ont leur premier enfant ?

Combien sont-elles à avoir fait des études, mais, qui, une fois mariées, devront croupir à la maison pour le restant de leur vie, parce que leur époux veut une femme au foyer, ou qu’il refuse que sa femme puisse être en contact avec d’autres hommes, serait-ce sur le lieu de travail. Et on leur aura expliqué qu’une femme doit une obéissance aveugle à son mari si elle veut espérer accéder un jour au Paradis.

Combien sont-elles à qui leurs époux, sous l’influence d’imams plus ou moins savants, refuseront le droit à toute forme de contraception et qui devront trimer pour nourrir et s’occuper d’une famille nombreuse alors que leurs maris seront au café ou à la mosquée ?

Combien sont-elles, qui, éreintées après une journée de travail, des heures d’attente et de transport en commun, les travaux ménagers, la cuisine, la vaisselle… devront, sans un mot, en silence assouvir les besoins d’un homme qui ne leur manifestera pas un gramme de tendresse, qui ne leur prodiguera pas un baiser, pas une caresse ? Parce qu’on leur aura expliqué qu’une femme n’a pas le droit de se refuser à son mari et que si elle le fait, les anges passeront la nuit à la maudire.

Voila une cause qui mérite qu’on se mobilise pour elle. Mais cette mobilisation ne doit pas se faire à El Menzah 6 ou à la Kasbah. Elle doit se faire dans les banlieues défavorisées de Tunisie, dans les campagnes, utiliser les centres de planning familial…  Au lieu de manifester dans les quartiers chics, il faut battre le pavé, aller à la rencontre de ces femmes, leur expliquer que si on se bat, ce n’est pas tant pour avoir le droit de se baigner en bikini ou porter la jupe, mais c’est bien pour ELLES.

Pour qu’ELLES aient droit à une vie digne. Pour qu’elles aient droit au respect qu’elles méritent. Pour qu’elles aient le droit de dire non quand on veut les marier à un homme qu’elles n’aiment pas. Pour qu’elles aient le droit de choisir un moyen de contraception qui leur convient. Pour quelles ne soient plus battues, pour qu’elles aient le droit d’étudier et avoir une chance de sortir de la misère. Pour qu’elles aient le droit de travailler dans des conditions justes et équitables. Pour qu’elle ait le droit de choisir la vie qui leur convient. Pour que les hommes, qui bénéficient du double de l’héritage, soient mis face à leur responsabilité de chef de famille et qu’ils leur assurent une vie digne et honorable et qu’ils leur témoignent l’amour et le respect qui leur est dû.

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